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30 octobre 2013 3 30 /10 /octobre /2013 22:00

http://images.allocine.fr/r_640_600/b_1_d6d6d6/pictures/210/232/21023233_20130729173134181.jpgJe reviens à l’instant de Gravity, le dernier film d’Alfonso Cuaron, et l’envie me prend subitement de poser à l’écrit ce que le dernier plan m’a fait gamberger. Car oui, cela peut paraitre totalement con, mais ce seul dernier plan m’a fait voir la démarche de l’ami mexicain et de son fils de scénariste sous un angle totalement différent et nouveau. Pendant 1h30 je pensais regarder un simple « survival » dans l’espace qui n’avait que pour seul intérêt sa plastique (parce oui, c’est très beau, la gestion du son et de la musique, tout ça c’est chouette), et puis sur la dernière seconde je me suis dit qu’en fait non, il y avait peut-être quelque-chose au-delà de ça, comme une métaphore – et pas n’importe laquelle ! – une métaphore sur le miracle de la vie... Vous ne me suivez pas ? Vous ne voyez pas où je veux en venir ? Vous croyez que j’ai fumé ? Après tout ce n’est pas impossible : des fois je vois des trucs que j’ai envie de voir et que me dicte mon imagination polissonne. Mais bon, dans le doute, je fais tourner et vous me direz si, vous aussi, cette vision du film vous fait planer.

 

Ce que j’aime bien avec les mecs comme Cuaron, c’est qu’ils sont de cette trempe de réalisateurs qui ne font pas les choses au hasard, qui ne font pas des effets juste pour le style... Il y a toujours une logique d’ensemble, une cohérence dans la démarche. Moi je vous dis, cette histoire est en fait une métaphore sur le miracle de la vie, alors partons de ce postulat et observons. Premier plan : du noir et du silence. Quelques mots seulement. Je vous la fait de mémoire : « Dans l’espace, il n’y a pas d’air, pas de gravité, pas de place pour un souffle, les températures varient de -120 à +120 degrés Celsius. La vie y est IMPOSSIBLE. » Et pourtant un son organique monte jusqu’au firmament : « Gravity » (Un choix de titre intéressant d’ailleurs, j’y reviendrai à la toute fin de mon article dont j’ignore encore la longueur.) Situation initiale, premier plan, que voit-on ? Une portion de Terre vue de l’espace, sublime lumière, silence majestueux, plan fixe. Et dans ce silence de mort, on voit soudainement trainer là quelques innocentes formes blanches en train de s’amuser naïvement autour de leur navette. Tels des petits têtards innocents ils pendouillent au bout de leur flagelle et fanfaronne sans même s’interroger sur l’incongruité de leur présence dans ce lieu si hostile... D’ailleurs soudain, sans que personne ne s’y attende vraiment, un « missile » est tiré et percute un « satellite » entrainant une réaction en chaine. Nos gentils têtards tous blancs se retrouvent alors lancés dans une incroyable course à la survie : propulsés dans tous les sens, perdant leur repères, voilà qu’ils se doivent de rejoindre l’ovule spatial qui sera leur seule chance d’échapper au néant. Ils étaient une dizaine de prétendants, mais très rapidement ils ne sont plus que deux dans la course à la survie pour qu’au final il n’en reste plus qu’un seul pour pénétrer dans l’habitacle ovulaire de la station spatiale. Dès lors le docteur Ryan, la femme au prénom d’homme, le gamète au genre encore trouble, retire son costume de flagéleuse de l’espace et adopte alors... la position foetale. Commence alors la deuxième partie de l’aventure...

 

 lifestyle_cinema_gravity01.jpg

 

Désormais cloisonnée dans son oeuf maternel qui est de plus en plus austère, étroit, irrespirable, commence alors une longue course d’endurance pour espérer sortir du néant. Plus d’une fois le pauvre docteur Stone (qui en anglais veut dire « la pierre », la chose inanimée) se perd dans ce monde qui lui est étranger mais qu’elle connait malgré grâce à quelques formations qui lui restent gravées dans son esprit, comme un bon vieux reflexe reptilien. C’est dur, des moments elle abandonne, plus d’une fois elle manque de se laisser emporter par ce néant qui l’entoure, tellement plus grand, tellement plus logique que sa présence à elle dans cet univers... Après tout la vie c’est une sorte d’aléatoire chaotique : ça va et ça vient... ça a même tellement plus de chance de s’en aller que de venir :  l’histoire de sa pauvre petite fille, morte si innocemment en jouant... Un miracle de la vie qui prend bêtement fin au bout de 4 ans. A quoi bon lutter ?... Mais bon... Le camarade têtard qu’était l’ami Kowalski a raison : au fond il n’y a que deux alternatives. Soit on choisit d’abandonner l’affaire parce qu’on n’estime que ça vaut pas le coup, soit on lutte et on va jusqu’au bout, mais dans ces cas là on arrête avec les états d’âme. Pas besoin de chercher un sens à tout ça. On est là, on est légitime par le simple fait d’être là, alors on reste et on continue d’appliquer cette aberration qu’est peut-être la vie... Ainsi, dans un dernier effort, le foetus Ryan entend jouer sa carte, jouer sa fenêtre de sortie. La station chinoise « caresse l’atmosphère », elle est cette zone de contact entre le néant et le vivant : le temps est venu de franchir le cap. Et si on rate, tant pis... « Sans rancune »...

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Et voilà qu’on rentre dans le grand final. Le quitte ou double. Dans les vrombissements des contractions de Tiangong, la pauvre Ryan – pleine de peur mais aussi d’envie de vivre – se retrouve propulsée vers l’atmosphère, vers la vie. L’entrée est rude, non sans danger. Elle est expulsée de sa poche amniotique violemment, manque de se noyer dans son propre liquide, mais au prix d’une nouvelle apnée, d’un nouvel effort vers la vie, elle échoue enfin, ventre contre terre, sur le sol maternel. Elle voit enfin la vraie lumière, sent de ses mains la douceur de son nouveau monde. Elle hume l’air. C’est un miracle, mais elle est là. Pourquoi ce miracle ? Quel en est le sens ? Quelle en est la raison ? Le temps n'est plus aux questions. Elle est en vie. Elle est dans son monde qui est accueillant pour elle, alors elle ne se pose plus de questions. Après tout, tout cela n'a peut-être pas de sens, à moins que ce soit juste la conséquence d'une simple force essentielle de l'univers, qui amène chaque corps à se percuter, se regrouper, se rejoindre, pour en former de nouveaux, encore plus grands et plus beaux. Peut-être qu'au fond la vie n'est que la conséquence d'une chose basique mais fondamentale dans cette univers : la gravité. Cette gravité, elle nous bouscule, elle nous fait tomber, elle nous broie la plupart du temps, telle une pesanteur, mais au final c'est elle qui nous raccroche à cette Terre, à cette concentration de vie... Après tout, que nous coûte le fait de gérer cette gravité dans notre quotidien. Il suffit de se lever et de marcher... C'est dur, mais on s'y fait. C'est d'ailleurs le sourire aux lèvres que le docteur Stone prend vie, qu'elle se lève telle un nouveau-né et fait ses premiers pas, chancelante. C'est dur mais qu'importe. C'est tellement beau d'etre là pour lutter contre cette force qui au fond est à la base de tout ce qu'il y a de plus beau. Ryan Stone avance, sourit, juste avec dans l'esprit la chose la plus importante qui soit : la jouissance d'être là, le plaisir d'assister et d'être à la fois ce miracle qu'est la vie...

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Voilà... C’est puissant non ? Je ne sais absolument pas si c’est vers ce cheminement là que les Cuaron père et fils voulaient nous conduire, mais en tout cas une chose est sûre, moi je suis content de mon cheminement à moi... Après tout c’est le propre de l’art : le spectateur ne dialogue pas avec l’artiste mais avec l’oeuvre. Elle a sa vie propre. Nous mêmes, en tant que spectateurs, nous avons un rapport à elle qui lui est aussi propre. Finalement, rien que pour ça, je ne peux qu’apprécier Gravity... Même si ce n’était pas voulu, grâce à ce film, l’espace d’un instant j’ai été saisi par cette puissance de l’univers, par cette fragilité mais en même temps l’incroyable force qu’a la vie à se faire une place dans ce néant majestueux. Alors oui, cette heure et demie m’ont parfois parues un peu longuette, mais l’effet final valait bien ça. Ah que j’aime le cinéma quand il nous offre ces moments là...

 

 

 

 

 

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